PROJECTEUR SUR LA DEUXIÈME STATUE LA PLUS GRANDE D’AFRIQUE
Du haut de ses 30 mètres, elle s’impose à l’œil. Nul n’a vu une amazone aussi géante ! Logé en plein cœur de ville, entre le Palais des Congrès et le Port Autonome de Cotonou, le Monument Amazone est devenu l’une des principales attractions de la capitale. Il draine au quotidien des centaines de visiteurs. Au-delà de la bravoure féminine, ce monument symbolise l’héroïsme de tout un peuple.
Douzième arrondissement de la capitale économique du Bénin, sur le boulevard de la Marina et face au Palais présidentiel, à moins de trois kilomètres du parking de l’aéroport international Cardinal Bernardin Gantin; l’esplanade de l’Amazone se laisse découvrir grâce à un chef-d’œuvre sculptural baptisé: le Monument Amazone. Difficile, pour un visiteur, de ne pas remarquer à la descente de l’avion, cet édifice colossal, revêtu en bronze. De structure métallique, il mesure trente mètres hors socle, pour un poids de 150 tonnes. C’est la deuxième plus grande statue d’Afrique, après le Monument de la Renaissance au Sénégal (59 mètres). L’œuvre a été réalisée par l’artiste-sculpteur de renommée internationale Li Xiangqun. Le Monument Amazone représente un personnage féminin en mouvement, le visage ferme, le pied gauche posé sur un tertre. C’est une jeune femme à l’allure brave qui porte une armure archaïque. Elle tient dans sa main droite un sabre artisanal et dans sa main gauche, le canon d’un fusil dont la crosse est posée à terre. C’est le prototype de la guerrière intrépide ! Ce monument est justement une ode à la bravoure des femmes d’hier et d’aujourd’hui. « En hommage à elles, à ces femmes, à ces amazones, cette statue de toute beauté et de toute grâce sera à nos yeux et à ceux de nos visiteurs, le symbole de la femme béninoise, celle d’aujourd’hui et celle de demain », a signifié le Président béninois Patrice Talon à l’occasion de l’inauguration du monument Amazone, le 30 juillet 2022. Ce monument est érigé dans une zone qui présente un réel intérêt touristique grâce aux aménagements faits.
LIEU DE DÉTENTE !
Cadre spacieux, écologique, bien entretenu, donnant une magnifique vue sur l’Océan Atlantique, l’esplanade de l’Amazone offre des possibilités de détente, de rencontres, d’activités plein air pour Focus 33 les résidents, les touristes, estivants, festivaliers et pèlerins. « Je ne sais pas comment cela s’explique, mais c’est un lieu qui rassemble naturellement du monde à Cotonou. Il n’y a pas de places assises, pas de banquettes, et pourtant la place de l’Amazone draine du monde chaque jour », confie Luan Carène Amoussou, danseuse professionnelle et chorégraphe, qui profite régulièrement de cet espace où plusieurs danseurs viennent arborer leurs performances. Donald Kouthon qui a fait de cet espace son lieu favori de divertissement, recommande : « Si vous cherchez un endroit pour marcher et vous évader un peu, ne réfléchissez pas longtemps ! L’esplanade de l’Amazone est épatant pour l’aventure ! ».
ZONE D’INTÉRÊT !
L’esplanade de l’Amazone est une nouvelle attraction pour les touristes mais autant pour les investisseurs immobiliers : les complexes hôtelievrs autour du monument vont capter davantage de touristes. D’autres complexes sont déjà en gestation dans la zone. Le monument Amazone fait donc les affaires des promoteurs immobiliers et c’est dans l’ordre normal des choses. « Dans les grandes villes, on retrouve souvent ce genre de monument, comme le monument de la Renaissance à Dakar, la Tour Eiffel à Paris ! Tout visiteur en garde le souvenir ! », explique Abraham Avakoudjo, architecte-urbaniste. Mais à l’en croire, le monument Amazone peut offrir davantage. « Je pense que cette place doit intégrer des éléments qui permettent de vendre davantage le Bénin. Quand vous allez à la Tour Eiffel, il y a, tout autour, un écosystème de vente de gadgets qui sont inspirés du monument et que les touristes achètent! Il faudrait penser à créer autour du monument Amazone, cet écosystème commercial de gadgets: cartes postales, médaillons, porte-clés, statuettes et bien d’autres choses dérivées de l’amazone que les visiteurs pourraient acheter en souvenir ! S’il y avait la possibilité de monter pour voir l’amazone de plus près, et prendre des photos, sans détériorer les installations, ce serait tout aussi intéressant ! », suggère l’expert et il nuance : « Il n’est pas question de restaurants à mettre autour du monument ! Il est important de comprendre qu’il s’agit de gadgets… Imaginez des casquettes, des T-shirts sur lesquels on écrit : « J’adore le Bénin ! » , illustre-t-il. Des réflexions auxquelles est appelée l’Agence pour l’entretien et l’exploitation des parcs, édifices et places publiques (Apep), nouvellement créée pour assurer le maintien permanent, en bon état d’exploitation, des édifices et espaces publics aménagés.
DANS LES COULISSES DU PROJET
Mercredi 17 juillet 2019, au terme de la séance hebdomadaire du Conseil des ministres, le gouvernement béninois annonce la décision d’ériger un monument en hommage aux amazones. Après consultations nationales et internationales, la réalisation de l’œuvre est confiée à l’artiste-sculpteur chinois Li Xiangqun, de la Société Beijing Huashi Xiangqun Culture et Art Co. Ltd. Natif de Harbin dans la Province du Heilongjiang en Chine, il est diplômé en Sculpture à l’Académie des Beaux-Arts (Luxun). La maquette du monument est présentée le mercredi 28 août 2019 et les travaux démarrent progressivement sur l’espace aménagé à cet effet, entre le Palais des Congrès de Cotonou et le Port Autonome de Cotonou.
Près de trois ans plus tard, dans la première moitié du mois de mai 2022, la sculpture est partiellement dévoilée. Les photos d’une géante guerrière aperçue du visage jusqu’au buste, inondent la toile. Sur les réseaux sociaux, les commentaires présentent l’œuvre comme étant une représentation de Tassi Hangbé, la seule reine qu’aura connue le royaume de Danxomè. Au regard de la polémique grandissante, cette rumeur est officiellement démentie par le gouvernement sur sa page Facebook le 14 mai 2022. « (…) La statue en cours de dévoilement a été érigée en hommage aux vaillantes amazones… ». Voilà qui met fin à l’amalgame! Le Monument Amazone sera finalement inauguré le 30 juillet 2022 par le Chef de l’État Patrice Talon.
La petite histoire !
Au sens strict, le mot Amazone renvoie à la mythologie grecque, mais dans le contexte béninois, le Monument Amazone fait plutôt référence à un ancien régiment militaire entièrement féminin qui a existé dans le royaume de Danxomè jusqu’à la fin du XIXe siècle. Dr Patrick Emery Effiboley, Chef du Département d’Histoire et d’Archéologie à la Faculté des Sciences humaines et sociales (Fashs) de l’Université d’Abomey-Calavi, nous replonge dans l’origine de ce corps armé spécialisé. « Amazone est pour moi, un nom inapproprié pour désigner le corps des armées féminines dans le royaume du Danxomè et dont le nom propre est Agodjié. Ces femmes guerrières étaient des femmes de valeur et d’honneur qui avaient pour seul objectif, la défense du royaume de Danxome. L’essor de cette troupe remonte en effet à l’arrivée au pouvoir de la sœur du roi Akaba, Tassi-Hangbé (1708-1711) qui, elle-même, n’est pas facilement acceptée dans la succession des rois du Danxomè. Les Agodjié étaient très organisées à l’interne et constituaient une force spéciale à la disposition de la reine. D’ailleurs, les rois qui ont suivi Tassi Hangbé, de Agadja jusqu’à Béhanzin, ont maintenu ce régiment et s’en sont servi pour venir à bout de leurs adversaires. Sous le règne du roi Guézo (1818-1858), ce régiment va se développer et connaître un développement fulgurant, inspirant la crainte. Les troupes françaises, lors de l’invasion coloniale en 1892, restent marquées par la bravoure de cette armée féminine redoutable, aux ordres du roi Béhanzin. L’on retient de ces femmes vaillantes, des valeurs telles que le courage, l’intégrité, le patriotisme, le don de soi… Cela s’entend bien que l’on produise ce modèle à suivre non seulement pour les femmes, mais aussi pour les hommes, car la valeur n’a pas de genre. Nous sommes tous appelés à porter ces valeurs patriotiques qu’ont démontrées les Agodjié ».
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